Petit guide pratique de la mise en place dans une PME d’une organisation pluri-hebdomadaire du temps de travail

 

Introduction :

Objectif : permettre à l’entreprise, dont l’activité comporte des variations de sa durée hebdomadaire, d’adapter et d’organiser les temps de travail de ses salariés.

+ Assouplissement et simplification

  • Ancien régime: dérogations au cadre hebdomadaire : modulation, cycles de travail, annualisation par attribution de JRTT, temps partiel modulé.

Dispositifs abrogés (anciens articles L 3122-1 à 22) sauf sécurisation des accords existants conclus avant la loi du 20/08/08 (circulaire DGT n°20 13/11/2008) :

  • les accords antérieurs continuent de s’appliquer jusqu’à leur terme ou jusqu’à leur révision ou dénonciation selon le cas. La renégociation s’impose pour bénéficier des nouvelles règles.
  • Soc 13/06/2012 (n°11-12192 et 11-17110) : la sécurisation ne s’applique pas aux accords ouvrant la « possibilité » d’organiser le travail par cycle et qui renvoient à la négociation d’accords locaux. Solution transposable aux anciens accords-cadres de modulation.

Prob de l’ancienne modulation et cq qui demeurent actuelles

  • Régimes en vigueur: dispositif de répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année ou sur une période limitée à 4 semaines:
  • Dispositif conventionnel de principe: Loi 2008-789 du 20/08/2008 applicable depuis le 22/08/08. (II)
  • Dispositif règlementaire supplétif: Décret 2008-1132 du 04/11/2008 applicable depuis le 06/11/08. (I)
  • Sanctions similaires dans les deux dispositifs (III)

 

I / Emprunter la voie réglementaire supplétive:

Codification : articles D 3122-7-1 à 7-3 du Code du travail

En l’absence d’accord collectif, il est possible d’aménager la durée du travail sous forme de périodes supérieures à la semaine mais chacune de 4 semaines au plus.

1/ Modalités de mise en place du dispositif

  • Pas de support conventionnel: seulement un programme indicatif de la variation de la durée du travail:
  • établi par écrit par l’employeur ;
  • soumis pour avis, avant sa première mise en œuvre au CE ou à défaut aux DP ;
  • transmis pour information à l’inspecteur du travail ;
  • affiché sur les lieux de travail.

Toute modification ultérieure du programme est soumise aux mêmes règles.

En outre, au moins une fois par an, l’employeur communique au CE et, à défaut, aux DP, un bilan de la mise en œuvre du programme indicatif.

  • Accord du salarié ? oui et exprès en application de la JP précitée car la loi du 22/03/2012 ne vise que la répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année résultant d’un accord collectif.

2/ Contenu du dispositif

  • Le programme indicatif doit indiquer, pour chaque semaine comprise dans la période de référence choisie, l’horaire et la répartition du travail.

Le dispositif :

  • permet d’alterner, à l’intérieur de la période de référence choisie, des semaines « courtes » d’une durée inférieure à la durée légale ou conventionnelle (comportant ou non des temps de repos par journée ou demi-journée) et des semaines « longues » dépassant cette durée ; il est possible de faire varier l’horaire de 0 à 48 heures d’une semaine sur l’autre.
  • permet d’organiser un travail en cycles, mais la durée du cycle étant limitée à 4 semaines;
  • permet de réduire le temps de travail sur une période de 4 semaines par attribution de journées ou demi-journées de repos : mais pas d’obligation de compenser les semaines de plus de 35 heures par l’attribution de journées ou demi-journées de repos ;
  • doit respecter les durées maximales hebdomadaire et journalière ; les repos quotidien et hebdomadaire. Toutefois la durée maximale hebdomadaire de 39 heures de l’ancien dispositif a été supprimée.
  • Les salariés doivent être prévenus des changements de leurs horaires dans un délai de 7 jours ouvrés au moins.
  • Heures supplémentaires: ce sont les heures effectuées au-delà de la moyenne de 35 heures calculée sur la période de référence de 4 semaines au plus, déduction faite, le cas échéant, des HS effectuées au-delà la limite haute hebdomadaire et déjà comptabilisées.
  • En cas d’arrivée ou départ en cours de période de référence, le salaire doit être maintenu sur la base de 35 heures hebdomadaires pendant les semaines basse.
  • En cas d’absence indemnisée, le temps non travaillé n’est pas récupérable et est valorisé comme si le salarié avait été présent, en prenant en compte les heures supplémentaires.
  • Lissage : la rémunération est indépendante de l’horaire réel de la période aménagé et est calculée sur la base 35 heures, sauf HS en sus au-delà de la limite haute hebdomadaire.

II / Emprunter la voie conventionnelle :

Codification : articles L 3122-2 à -5 du Code du Travail

1/ Modalités de mise en place

  • Conclusion d’un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, d’une convention ou accord de branche.

En cas de mise en place d’un accord d’entreprise et en présence d’un accord branche, le premier prime quelle que soit la date de conclusion du second.

En cas de mise en place par accord de branche, un arrêté d’extension n’est pas obligatoirement requis.

Formalisme et publicité communs à toute mise en place d’horaire collectif :

  • consultation préalable des IRP,
  • communication à l’inspecteur du travail
  • affichage sur les lieux de travail

En l’absence de DS, quelles sont les solutions de négociation pour la PME depuis le 31/12/2009 (date d’entrée en vigueur sur ce point de la loi du 20/08/2008) ?

 

IRP

présentes

Négociation dérogatoire

par CC ou AC de branche

Effectif inférieur

à 200 salariés

Validation
  Négociation avec :

 

 
DS

 

Indifférent DS  
Aucun RP

 

–       Pas prévue

 

–       Prévue : respect des modalités conventionnelles

salarié mandaté par 1 ou plusieurs OS représentatives par référendum des salariés à la majorité des suffrages exprimés
CE – DUP et/ou DP

 

–       membres titulaires CE ou DUP

–       à défaut, DP titulaires

 

condition de majorité légale ou conventionnelle

par la commission nationale paritaire de branche dans les 4 mois de la transmission (le silence réputant validation)

 

Rappels :

  • depuis la loi du 20/08/2008, il n’est plus exigé que la convention ou accord de branche autorise et prévoie les modalités de la négociation dérogatoire. Si elles existent, les parties sont tenues de s’y conformer ;
  • la possibilité de négocier avec le RSS n’est possible qu’à défaut des autres possibilités dérogatoires ;
  • l’employeur doit informer les organisations syndicales représentatives dans la branche de sa décision d’engager des négociations (L 2232-21 al 2)
  • Soc 14/01/2014 n°12-19412 : à défaut de DS, seule la loi peut dire qui peut négocier et conclure un accord collectif.

« Attendu cependant, qu’en l’absence de délégués syndicaux dans l’entreprise, seul un accord négocié dans les conditions prévues par l’article L. 132-26 du code du travail, alors en vigueur, pouvait avoir la nature et les effets d’un accord collectif ;

Qu’en statuant comme elle l’a fait, alors qu’il résultait de ses constatations que l’accord du 15 décembre 2004 n’avait pas été négocié et conclu suivant les prévisions de ce texte, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences de ses constatations, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 15 mars 2012(…) »

  • Accord du salarié ?
  • Jurisprudence : Soc. 23/09/2009 n°07-44712 et 28/09/2010 n°08-43161 : l’application de dispositifs d’annualisation ou de modulation constitue une modification du contrat supposant l’accord exprès du salarié.
  • Loi n°2012-387 du 22/03/2012 applicable après le 24 mars 2012 (article L 3122-6) : la mise en place par accord collectif d’une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année ne constitue pas une modification du contrat de travail.
  • Soc 25/09/2013 n°12-17776 PBR : en l’absence de caractère interprétatif et d’effet rétroactif, la loi du 22/03/2013 n’est applicable qu’au-delà du 24 mars 2012 et ne concerne pas la mise en œuvre effective de dispositifs postérieurement à cette date. Pour les situations antérieures, un accord individuel exprès est requis (problème de régularisation et du choix du motif à l’origine de la modification et conséquences).

2/ Contenus obligatoire et facultatif de l’accord

  • Eu égard au principe de subsidiarité de la convention de branche, l’accord d’entreprise n’est pas soumis au principe de faveur : des dispositions moins favorables sont possibles même si la convention ou l’accord de branche l’interdit expressément.
  • Clauses obligatoires réduites au minimum:
  • Conditions et délais de prévenance des changements de durée ou d’horaires de travail: faute de précision, application du délai de 7 jours calendaires (« ouvrés » pour l’ancienne modulation).

Un délai plus court est donc possible sans contrepartie spécifique.

Les délais peuvent être différenciés en fonction de la nature de la modification horaire.

  • Limites pour le décompte des heures supplémentaires:

Fixation d’un seuil pluri-hebdomadaire ou annuel de déclenchement des heures supplémentaires – 1607 heures par an ou moins – et d’un plafond hebdomadaire de déclenchement.

Le seuil de déclenchement des heures supplémentaires ne peut pas être fixé mensuellement à 151.67 heures.

« Attendu qu’il résulte de l’arrêt confirmatif attaqué et du procès-verbal de l’inspecteur du travail, base de la poursuite, qu’un accord collectif d’aménagement et de réduction du temps de travail, conclu le 11 octobre 2005 et modifié le 19 décembre 2008, a été mis en oeuvre au sein de la société ” Proségur sécurité humaine “, dont M. X… est le gérant ; que cet accord a prévu un décompte des heures supplémentaires à partir d’un cadre annuel, pour les heures effectuées au-delà de 1607 heures, ainsi qu’un cadre mensuel avec un seuil théorique de 151, 67 heures travaillées après déduction, le cas échéant, des heures non travaillées en deçà de cette durée sur les mois précédents ; que l’inspecteur du travail ayant constaté que cet accord comportait des clauses contraires aux prescriptions de l’article L. 3122-4 du code du travail, M. X… a été poursuivi devant la juridiction de proximité sur le fondement de l’article R. 3124-7 dudit code ; que le juge du premier degré a déclaré la prévention établie ; que M. X… et le ministère public ont relevé appel de cette décision ;

Attendu que, pour confirmer le jugement entrepris, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu’en se déterminant ainsi, la cour d’appel a justifié sa décision dès lors que, selon l’article L. 3122-4 du code du travail, la dérogation conventionnelle régissant le décompte des heures supplémentaires ne peut être opérée qu’à partir des deux seuils de 1607 heures annuelles ou de la moyenne de 35 heures calculées sur la période de référence retenue par l’accord ; (…)

REJETTE le pourvoi ; »

Par contre, possibilité d’organiser le temps de travail sur une durée collective annuelle supérieure à 1607 heures (sous réserves de respecter les durées maximales, les congés légaux et le 1er mai chômé) et donc au maximum de 2041 heures annuelles.

Décompte : constituent des heures supplémentaires selon le cadre conventionnel:

  • Cadre annuel:
  • En cours d’année, les heures effectuées au-delà de la limite haute hebdomadaire (en l’absence de limite haute, aucune HS n’est décomptée en cours d’année) ;
  • En fin de période, celles effectuées au-delà de 1607 heures annuelles ou de la limite inférieure, déduction faite, le cas échéant, des HS effectuées au-delà la limite haute hebdomadaire et déjà comptabilisées ;
  • Cadre infra-annuel:
  • En cours d’année, les heures effectuées au-delà de la limite haute hebdomadaire (en l’absence de limite haute, aucune HS n’est décomptée en cours d’année) ;
  • En fin de période, celles effectuées au-delà de la moyenne de 35 heures calculée sur la période de référence, déduction faite, le cas échéant, des HS effectuées au-delà la limite haute hebdomadaire et déjà comptabilisées.
  • Conditions de prise en compte, pour le calcul de la rémunération, des absences et des arrivées et des départs en cours de période.

Exemple : incidence des absences sur le seuil de déclenchement des heures supplémentaires :

  • 13/07/2010 n°08-44550 :

« Qu’en statuant ainsi, en ayant assimilé les heures d’absence pour maladie à un temps de travail effectif, alors qu’il lui appartenait, après avoir vérifié que les absences pour maladie se situaient bien en période de haute activité, de comparer le nombre d’heures effectivement accomplies par le salarié pendant l’année au seuil de déclenchement des heures supplémentaires tel que déterminé ci-dessus, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il décide que la société Marrel doit comptabiliser les heures d’absence pour cause de maladie afin d’apprécier le nombre des heures supplémentaires, et condamne l’employeur au paiement de rappels d’heures supplémentaires et congés payés afférents, l’arrêt rendu le 25 juillet 2008 (…) « 

  • 09/02/2011 n° 09-42939 :

« Attendu que pour faire droit à cette demande, l’arrêt retient par motifs propres et adoptés, que si les heures sans solde accordées par l’employeur à M. X… devaient être déduites des mois au cours desquels elles ont été effectuées, en application de l’article 8.3.5 de l’accord d’entreprise, ces heures d’absence ne devaient en aucun cas avoir des conséquences sur les heures supplémentaires effectuées et payées en fin de semestre, que c’était donc à tort que l’employeur ne leur avait pas appliqué la majoration de 25 % ;

Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a fait droit à la demande de majoration de 25 % des 15 heures d’absence autorisée et sans solde, l’arrêt rendu le 10 juin 2009 (…) »

  • 14 novembre 2013 n°11-17644 :

« Mais attendu qu’aux termes de l’article L. 3122-9 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, « Une convention ou un accord collectif de travail étendu ou une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire du travail peut varier sur tout ou partie de l’année à condition que, sur un an, cette durée n’excède pas un plafond de 1 607 heures. La convention ou l’accord peut fixer un plafond inférieur… » ; qu’aux termes de l’article L. 3122-10 du même code dans sa rédaction applicable au litige »… II-Constituent des heures supplémentaires auxquelles s’appliquent les dispositions relatives au décompte et au paiement des heures supplémentaires, au contingent annuel d’heures supplémentaires et au repos compensateur obligatoire :… 2° les heures effectuées au-delà de 1 607 heures ou d’un plafond inférieur fixé par la convention ou l’accord, déduction faite des heures supplémentaires déjà comptabilisées au titre du 1°. » ; qu’il résulte de ces dispositions que le seuil de déclenchement des heures supplémentaires ne peut être supérieur au plafond de 1 607 heures de travail par an, quand bien même le salarié n’aurait pas acquis l’intégralité de ses droits à congés payés au titre de la période de référence prévue par l’accord ;

Et attendu que le conseil de prud’hommes ayant constaté que les salariés, auxquels s’appliquait un accord de modulation, avaient effectué plus de 1 607 heures de travail au cours de la période de référence prévue par cet accord, en a exactement déduit que ceux-ci étaient fondés à percevoir le paiement de rappels à titre d’heures supplémentaires ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois »

  • Lorsque le dispositif s’applique aux temps partiels, modalités de communication et modification de la répartition de la durée et des horaires de travail
  • Clauses recommandées:
  • Période de variation, le cas échéant, de la durée du travail (maximum l’année)
  • Unités de travail et salariés concernés
  • Modalités de décompte de la durée du travail (ce qui est pris en compte dans le temps de travail effectif) ;
  • Principe et modalités du lissage de la rémunération

III / Sanctions encourues

  • Aucune sanction pénale spécifique. Quid du travail dissimulé ?
  • Sanctions civiles: application du droit commun (retour au décompte de la durée dans un cadre hebdomadaire, mais sans automaticité : Soc. 19/09/2012 n°11-22782).

En cas de non-conformité de l’accord collectif ou de non-respect des dispositions du décret.

Idem en cas de non- respect des règles d’information.

Idem en cas de non-respect des modalités de mise en place unilatérale fixées par accord de branche (application directe) : Soc 06/05/2009 n°07-40235.

 

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